đ§œ La ville Ă©ponge
Ce quâil y a de bien avec ce coup de chaud sur nos villes, câest quâil remet sur le tapis la nĂ©cessitĂ© de les adapter au bouleversement climatique. Tous Ă coup les mĂ©dias bruissent de propositions de dĂ©minĂ©ralisation et de vĂ©gĂ©talisation de nos villes. La grande dĂ©couverte est sur toutes les lĂšvres : les arbres apportent ombre et fraicheur, et pourraient permettre de rendre habitables nos espaces urbains Ă lâĂšre des canicules qui se banalisent. Mais avec les premiĂšres pluies qui nous ramĂšnent aux moyennes saisonniĂšres du XXe siĂšcle, on passe Ă autre chose. Câest trĂšs bien de parler de la nĂ©cessaire transformation de nos villes, mais il est temps de sây mettreâ!
Il va falloir plus que lâannonce dâun chĂšque de 500 millions dâeuros et de lâouverture dâun numĂ©ro vert pour changer les choses. La durĂ©e de vie dâun espace public est dâune trentaine dâannĂ©es, nous sommes dĂ©jĂ en train de rĂ©aliser aujourdâhui les espaces publics de 2050. Chaque chantier engagĂ© devrait donc ĂȘtre marquĂ© par lâurgence climatique, et pensĂ© pour le climat de demain. Comment faire de la place en rĂ©duisant celle occupĂ©e par la voitureâ? Comment retrouver des sols permĂ©ables pour transformer la ville en une vaste Ă©ponge et rĂ©duire les risques d'innondations ? Comment vĂ©gĂ©taliser massivement nos rues pour les tempĂ©rerâ?
Mais il ne suffit pas de peler la croĂ»te dâenrobĂ© pour transformer un sol urbain en substrat fertile et y planter des forĂȘts urbaines comme autant de climatiseurs naturels. Sous nos trottoirs fourmillent les rĂ©seaux qui gĂȘnent les racines, nos nappes de parkings dissimulent des sols polluĂ©s par les gĂ©nĂ©rations prĂ©cĂ©dentes et la vie a quittĂ© depuis longtemps ces terres encapsulĂ©s sous les rĂ©sidus pĂ©troliers. Faire de la place, dĂ©minĂ©raliser tout ça, rĂ©activer les sols et planter massivement nâa rien de simple, mais qui a dit que cette redirection le seraitâ?
Car les infrastructures techniques ne suffiront pas Ă passer le siĂšcle. La trame de pleine terre et le couvert vĂ©gĂ©tal constituent des infrastructures naturelles lĂ©gitimes et vitales quâil nous faut commencer Ă bĂątir dâurgence. Pas des dĂ©monstrateurs plantĂ©s devant les mairies pour Ă©gayer les journalistes les jours de canicules et encombrer Instagram, mais une transformation en profondeur des espaces publics du quotidien, en requestionnant systĂ©matiquement lâusage de chaque mĂ©trĂ© carrĂ© impermĂ©abilisĂ© et nos façons de les amĂ©nager.
Câest un formidable enjeu que dâapprendre Ă repenser la place du vivant dans la ville, en apprenant Ă y tisser la pleine terre, lâeau et le vĂ©gĂ©tal. Cette ville nature prendra du temps Ă se faire, mais il faudra aussi sây faire. Ce nâest pas d'un bout de nature en ville dont nous avons besoin, mais d'ouvrir grand la porte au vivant dans toute sa diversitĂ©. Nous allons devoir apprendre Ă vivre avec lâabeille comme le moustique, lâĂ©cureuil comme le rat. En laissant la place aux non-humains dans la ville, les humains pourront peut-ĂȘtre aussi continuer d'y vivre.
â Sylvain Grisot (Twitter / Linkedin)
PS : Retrouvez moi à Bordeaux Zéro Carbone le jeudi 30 juin. N'hésitez pas venir faire un coucou !
François Vadepied est paysagiste, cofondateur de l'agence Wagon Landscaping, et enseignant Ă l'Ăcole SupĂ©rieur d'Architecture des Jardins et des Paysages Ă Paris. Nous l'avons rencontrĂ© pour qu'il nous raconte de son projet Asphalte Jungle, la dĂ©simpermĂ©abilisation de 18 m2 dans la cour d'un l'immeuble dans le 11Ăšme arrondissement Ă Paris.
đ Vendredi 24 juin Ă Paris, on se demande quel est l'avenir de l'architecture Ă l'Ăąge de l'AnthropocĂšne ? Ou pour faire un peu plus lĂ©ger, mais tout aussi intĂ©ressant, rdv samedi aprĂšs-midi pour dĂ©couvrir le musĂ©e des Ă©gouts ! (Leonard)
đ©âđ« Let's learn ! On a repĂ©rĂ© cette formation d'Ekopolis dispensĂ©e le 6 juillet Ă Pantin sur la rĂ©versibilitĂ© et transformation des bĂątiments, sujets qui nous tiennent Ă cĆur !
đ Pas de pub, des arbres ! Lâassociation Paysages de France a Ă©tĂ© fondĂ©e en 1992 en rĂ©ponse Ă la âFrance mocheâ des entrĂ©es de villes peuplĂ©es de panneaux publicitaires. Entretien avec Pierre-Jean Delahousse, son prĂ©sident, qui lutte contre la dĂ©gradation des paysages français : âUn panneau publicitaire, câest une entrĂ©e dans le dĂ©cor. DerriĂšre le panneau se dĂ©roule une ville, une autre ville : celle oĂč on a envie dâhabiter, d'aller se promener, de sâasseoir sur un banc, de rencontrer des gens.â (Tema archi)
đđœââïžRun the city. Fan de course Ă pied ? En branchant nos apps pour amĂ©liorer notre performance et mesurer notre rythme cardiaque, nous laissons aussi plein dâinformations sur nos trajets. Ces cartes de ville nord-amĂ©ricaines et europĂ©ennes montrent les parcours empruntĂ©s en ville par les coureurs : pas trop de surprise, les berges de fleuve et les bords de mer sont privilĂ©giĂ©s, mais on repĂšre aussi quelques chemins de traverse ! (Flowing data)
đŠ MĂ©tabolisme urbain. Retour sur les origines de cette notion, lâĂ©mergence dâune pensĂ©e systĂ©mique face Ă la pensĂ©e fonctionnaliste et moderniste qui caractĂ©risait la ville. Durant le XXĂšme siĂšcle, on passe dâune approche mĂ©tabolique de la ville comparĂ©e Ă un systĂšme chimique, Ă des mĂ©thodes complexes de comptabilisation des flux et de comparaison entre les villes. (PCA Stream)
đLe Signal, de Sophie Poirier (Editions inculte 2022) Ce nâest pas un essai, non. Pas vraiment un roman non plus, mais le rĂ©cit dâune dĂ©couverte fugace qui se transforme en amour, avec cette peur de la perte qui y est souvent associĂ©e. Une histoire dâamour avec un bloc de bĂ©ton singulier, perchĂ© et haut de la dune Ă Soulac-sur-Mer. Ce bĂątiment aux avant-postes des coups de vague, intensifiĂ©s par un climat qui sâemballe : le Signal. En quelques brefs et beaux chapitres, on suit la lente dĂ©gradation des lieux aprĂšs leur abandon, les mĂ©moires qui sâĂ©tiolent et le bruit du vent. JusquâĂ la fin toute proche.
Mais lĂ , Ă lâabri dans cette voiture qui tangue sous les assauts du vent, avec devant les yeux Le Signal et la mer dĂ©chaĂźnĂ©e, je comprends, câest nous qui sommes dans la tourmente. Câest nous quâil faut plaindre.
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