đŸ•°ïž À l'Ă©coute des temps de la ville

đŸ•°ïž À l'Ă©coute des temps de la ville

C’est une solution plus performante que la construction d’un bĂątiment passif, plus efficace qu’un changement de chaudiĂšre et plus sobre que de baisser le thermostat. Elle est lĂ©gĂšre, pas chĂšre, rapide Ă  dĂ©ployer, consomme fort peu d’énergie et de matĂ©riaux et n’émet pas de CO2, mais c’est pourtant le point aveugle de nos politiques urbaines : l’intensification des usages de l’existant. C’est pourtant la plus petite des boucles de l’urbanisme circulaire — et donc la plus efficace — et ses potentiels sont immenses.

Car, quant on prend le temps d’écouter battre les rythmes de la ville, on entend partout des temps morts : bureaux dĂ©laissĂ©s l’essentiel de la semaine, Ă©quipements publics ouverts une poignĂ©e d’heures, bĂątiments vides qui attendent leur dĂ©construction, places dĂ©sertĂ©es trois trimestres par ans, parkings oubliĂ©s, restaurants d’entreprise fermĂ©s l’aprĂšs-midi, Ă©coles en vacances, universitĂ©s esseulĂ©es


L’urbanisme n’a pas pris assez le temps de se prĂ©occuper d’autre chose que d’espace. Nous amĂ©nageons encore l’espace pour gagner du temps, alors qu’on pourrait amĂ©nager les temps pour gagner de l’espace. C’est le moment, avec la sobriĂ©tĂ© fonciĂšre qui s’impose comme une Ă©vidence. Chacun cherche sa friche, mais il y a aussi des temps en friche dans nos villes que l’on peut mobiliser.

Car intensifier les usages, c’est la sobriĂ©tĂ© essentielle. Celle qui Ă©conomise des surfaces et pas seulement de kW/h. C’est un bon moyen pour partager des charges qui s’envolent et des Ă©missions qui doivent se rĂ©duire par la mutualisation. C’est aussi provoquer un frottement crĂ©atif en multipliant les temps de contact entre les acteurs et actrices des lieux. Mais travailler les temps ce n’est pas que faire plus et accĂ©lĂ©rer, c’est parfois ralentir, et dĂ©saturer les espaces urbains pour les rendre vivables et aimables.

C’est le moment pour les faiseuses et faiseurs de villes de s’approprier tous les rythmes de la ville. L’urbanisme est trop longtemps restĂ© concentrĂ© sur la dĂ©cennie du projet urbain, jusqu’à nĂ©gliger les temps du quotidien : l’heure, la journĂ©e, la semaine, les saisons, l’annĂ©e, le cycle de vie du bĂątiment


Mais travailler les temps de la ville, c’est aussi Ă©vident que complexe, car dĂšs qu’on s’écarte du bĂ©ton et des mĂštres carrĂ©s, c’est pour parler d’humain et d’organisations. Et quand on a pris l’habitude de dĂ©dier Ă  chaque usage ses propres mĂštres carrĂ©s, difficile de changer de modĂšle. C’est aujourd’hui plus simple de construire un nouvel Ă©quipement sur un sol agricole que de mettre d’accord deux utilisateurs pour partager des locaux Ă  des heures diffĂ©rentes. Il nous faut repenser nos modes de programmation, l’organisation de nos locaux et surtout apprendre Ă  partager. C’est un changement de regard et d’outils.

Ce n’est pas simple, mais pourtant les expĂ©riences de repĂ©rage des temps morts de la ville, d’outils de mutualisation des espaces, d’occupations temporaires, de dĂ©marches de partage ou d’évolutivitĂ© ou de mixitĂ© des usages dans le neuf, se multiplient. Le gisement est lĂ , sous nos yeux, et nous l’avons nĂ©gligĂ©, mais les pionniers commencent Ă  l’activer : dans les bĂątiments existants et ceux qu’il nous reste Ă  construire, les Ă©quipements publics, les commerces, les bureaux, les logements et mĂȘme dans les espaces publics.

Alors, poursuivons l’enquĂȘte en collectant les retours d’expĂ©rience de ces pionniers. Nous pourrons en tirer les enseignements pour identifier comment faire essaimer ces dĂ©marches. Signalez-nous vos dĂ©marches, ou celles menĂ©es par d’autres que vous avez pu repĂ©rer.

C’est à vous maintenant !

— Sylvain Grisot (Twitter / Linkedin)

PS : Il est encore temps de commander votre exemplaires du premier cahier de dixit.net : L'idéologie sociale de la bagnole d'André Gorz, la livraison devrait avoir lieu la semaine prochaine !

PS2 : Je suis (trÚs modestement) sur la scÚne du Théatre de lŽEtoile du Nord samedi 28, autour du thÚme "Réparer la ville, réparer les vivants", on sŽy retouve ? (réservation).

En mai, Construction21, le rĂ©seau d’information et de rencontres des professionnels du secteur de la construction et de la ville durable, diffusera un dossier sur le thĂšme de l’intensification des usages en ville. Ce dossier sera rĂ©alisĂ© sous la rĂ©daction en chef de ÉlĂ©onore Slama (Mairie de Paris) et de Sylvain Grisot (dixit.net). Proposez dĂšs maintenant des sujets sous forme de retour d'expĂ©rience !

Exposition Ă  partir du 31 janvier Ă  Lyon sur "L'histoire naturelle de l'architecture : comment le climat, les Ă©pidĂ©mies et l’énergie ont façonnĂ© la ville et les bĂątiments". (CAUE 69)

Logement Ă©volutif. Aujourd’hui, vous ĂȘtes en pleine forme et vos enfants courent dans les escaliers, malgrĂ© vos rĂ©primandes. Mais quand est-il du jour oĂč ils se seront cassĂ©s la cheville ? Ou du jour oĂč vous aurez trop mal au dos pour grimper les marches ? Ou du jour oĂč votre belle-mĂšre viendra s’installer Ă  la maison pour Ă©viter l’EHPAD ? Ce dossier du CEREMA reprend les diffĂ©rentes formes d’évolutivitĂ© du logement : de la flexibilitĂ© des agencements, rapides et simples Ă  mettre en place, Ă  des changements plus structurels. Ces Ă©volutions posent des questions pas si Ă©videntes, mais essentielles : comment les habitant.es s’approprient ces espaces mouvants ? Quelles innovations conceptuelles, avant mĂȘme de parler techniques, sont nĂ©cessaires ? Comment faire la part des choses entre des changements irrĂ©versibles et des adaptations de court terme ? (CEREMA)

Urbanisme tactique. Souvenez vous des pistes cyclables dessinĂ©es Ă  la va-vite en jaune vif le long des routes, mais aussi de ces petites rues ou grandes places momentanĂ©ment fermĂ©es aux voitures ? Des expĂ©rimentations faites durant la pandĂ©mie du Covid, afin de tester de nouveaux usages des rues et de permettre aux citadin.nes de mettre le nez dehors. Certains de ces espaces apaisĂ©s sont devenus permanents : tour d’exemples Ă  travers le monde. In English. (Bloomberg)

Croire aux fauves, Nastassja Martin (Ă©ditions Verticales, 2019). Une fois n’est pas coutume, on vous parle d’un roman, mais autobiographique. Le 25 aoĂ»t 2015, Nastassja Martin, anthropologue spĂ©cialiste des populations arctiques, tombe nez Ă  nez avec un ours. Et cette rencontre est violente. La chercheuse revient sur la suite de son parcours, du traumatisme, et des questionnements poĂ©tiques, philosophiques et cauchemardesques que cela lui a laissĂ©, dans sa tĂȘte et dans son corps. Que ce soit le rĂ©cit ou la mĂ©tĂ©o glaciale du livre, attendez vous Ă  avoir quelques frissons.

L’évĂ©nement n’est pas : un ours attaque une anthropologue française quelque part dans les montagnes du Kamtchtka. L’évĂ©nement est : un ours et une femme se rencontrent et les frontiĂšres entre les mondes implosent.

dixit.net est une agence de conseil et de recherche urbaine. Tous les mercredis, nous décryptons les grands enjeux de la ville et de ses transitions. Si vous la lisez pour la premiÚre fois, c'est le moment de vous abonner à cette newsletter.

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