Visite du quartier de l'Abbaye à Grenoble
La cité de l’Abbaye à Grenoble, c’est une quinzaine de bâtiments qui bientôt fêteront leur centenaire, pourtant rien ne présageait qu’ils passent ce cap. Quand des pathologies structurelles sont diagnostiquées en 2011, les locataires sont progressivement relogés par le bailleur social dans la perspective d’une tabula rasa permettant de relancer un nouveau cycle immobilier optimisé pour les normes constructives du moment. Mais il en faut du temps pour reloger plus de 200 familles. Près d’une décennie pendant laquelle les volets se sont fermés un à un, mais les esprits ouverts. Progressivement le maintien de la plupart des bâtiments s’est imposé comme une évidence. C’est sans doute le témoignage d’un changement d’époque, mais aussi d’une démarche de projet qui a su instiller un doute créatif en posant des questions simples et essentielles. Pourquoi démolir ce qui fonctionne ? Que peut-on faire de mieux à la place ? Alors le problème patrimonial du bailleur est progressivement devenu un enjeu urbain, puis un projet urbain aux contours encore flous.
Car garder l’existant c’est accepter l’incertitude, assumer le bricolage et se lancer dans l’aventure sans connaître la fin de l’histoire. C’est aussi prendre le temps, mais sans laisser du vide. Puisque le quartier est vivant, le projet doit respecter les dynamiques qui y vivent, et même en initier de nouvelles. L’occupation temporaire de l’îlot central des « Volets Verts » s’est donc imposé comme un moyen d’occupation des lieux et de préfiguration des usages futurs. Cinq dispositifs très différents (appropriation et préfiguration des espaces publics, présence des services publics, activités sociales et solidaires, actions socio-culturelles et hébergement inclusif) occupent donc les lieux pour trois à cinq ans, animés autour d’une gouvernance partagée associant les pilotes du projet urbain, les occupants et les riverains.
Inutile de chercher à tirer de grandes généralités d’un projet aussi contextuel, tissé pas à pas. À part peut-être que structurer une démarche transitoire demande d’y consacrer du temps, beaucoup de temps, quitte sans doute à ralentir le projet urbain. Mais si tout était allé vite, il ne resterait rien de la Cité. Peut-être faut-il prendre le temps de laisser mûrir les projets au contact des usages ? Et s’il fallait ralentir ?
Allons visiter la Cité de l’Abbaye en compagnie de Nicolas Quantin, chef de projet pour la ville de Grenoble, de Pascal Dobias, directeur de la Maison des Habitants Abbaye-Jouhaux et de Nicolas Tixier, de Bazar Urbain, du groupement de Maitrise d’œuvre Urbaine :
— Sylvain Grisot (Twitter / Linkedin)
PS : C'est le moment de charger votre sac de vacances de quelques livres. Pourquoi pas le Manifeste pour un urbanisme circulaire, Réparons la ville ! ou nos trois premiers carnets avec des textes d'André Gorz, Jean Giono et André Corboz ? Tous ces livres sont aussi disponibles en version numérique. (Et pour vous, amis lecteurs, il n'y a pas de frais de port avec le code "MERCI")
🎙️Podcast. La ruralité en mouvement revient pour une saison 2 avec trois nouveaux entretiens, menés avec Gérard Hernja, Hélène Jacquemin et Sylvain Grisot. Ils y parlent d’éducation à la mobilité, de véhicule doux en moyenne montagne et d’un nouveau modèle d’aménagement du territoire. (Place des mobilités)
🔥 Politique de la ville. Alors que les émeutes font fleurir des analyses variées et parfois avariées ici et là, Renaud Epstein (lire ici notre entretien avec lui) revient aux sources des problèmes, avec un utile rappel sur l’état d’abandon d’une partie du territoire et de ses habitants (Le Monde) :
“Ce que révèlent les émeutes, ce n’est pas tant l’échec de la politique de la ville que celui de toutes les politiques publiques qui laissent se déployer la ségrégation, la stigmatisation et les discriminations, voire y contribuent.”
🔥 Politique de la ville (bis). Retrouvons aussi Max Rousseau auquel nous donnions la parole il y a quelques semaines, avec cette tribune appelant l’Etat à renouveler son regard sur les territoires, et à répondre aux émeutes par une stratégie articulant transition écologique, enjeux sociaux et soutien aux territoires qui en ont besoin. Difficile en effet d’imaginer une planification écologique décorrélée des territoires. (Le Monde)
👥 Entre soi. Une étude du MIT montre que les étatsunien·es sont de moins en moins enclins à se déplacer dans des quartiers socio-économiques différents. Il n’y a plus vraiment de balade sans avoir où aller ou d’exploration urbaine, mais plutôt un retour à des endroits familiers, déjà appréhendés. Il est encore difficile de savoir à quel point la pandémie de Covid 19 a marqué durablement nos comportements et notre mobilité. Mais l’histoire des grands mélanges urbains commence à laisser dubitatif. (Bloomberg)
The recovery of mobility to pre-pandemic levels alleviated some of the loss, but the behavioral change persisted to the end of 2021. Fewer people are visiting attractions like museums, restaurants or parks that are outside their immediate mobility radius, and they’re spending less time among residents at different socioeconomic levels.
Et pour finir, une petite vidéo (en anglais) qui permet de mieux comprendre les mécanismes de la compensation carbone :