đ€Â Alliances territoriales
Les promoteurs immobiliers constituent une espĂšce territoriale qui chasse en meute. LĂ oĂč vous en croisez un, il y en a souvent dâautres Ă la recherche de la mĂȘme ressource vitale : le foncier. Mais tout un pan du territoire nâen a pas vu la queue dâun seul depuis des dĂ©cennies, et pour cause : le prix de lâimmobilier y est si bas quâil peine Ă couvrir les coĂ»ts du logement collectif. Il y a donc dâun cĂŽtĂ© la France qui rit â mĂȘme si les temps sont plus difficiles â oĂč les CollectivitĂ©s peuvent lancer des projets urbains et les amĂ©nageurs faire la fine bouche, car les promoteurs rivalisent pour lâaccĂšs au foncier. Et puis la France qui pleure oĂč les CollectivitĂ©s peuvent aussi lancer des projets, mais qui restent dans les cartons faute dâopĂ©rateurs. Câest le cas par exemple Ă Saint Dizier oĂč la promotion privĂ©e nâa pas construit un immeuble collectif depuis plus de trente ans.
Mais câest lĂ quâintervient Grand Paris AmĂ©nagement (GPA), dans ce rĂŽle dâinnovateur et dâentremetteur qui lui va si bien. LâamĂ©nageur a proposĂ© une solution de jumelage foncier entre Saint-Dizier et Aubervilliers, permettant de faire ruisseler vers la ville moyenne quelques gouttes de lâattractivitĂ© du Grand Paris. On imagine trĂšs bien la suite : les rĂ©unions qui sâenchaĂźnent, les tableurs Excel qui chauffent et la procĂ©dure qui se complexifie selon le fameux adage Shadock : «âpourquoi faire simple quand on peut faire compliquĂ©â».
Mais non, ici le parti-pris est de faire vite et low-tech. Car il sâagit dâune seule consultation avec un mĂȘme niveau dâexigence qualitatif pour deux fonciers sĂ©parĂ©s de plus de 200 km. Celle-ci donne ensuite lieu Ă deux procĂ©dures de cession distinctes gĂ©rĂ©es par chacune des communes. Il nây a donc pas de complexitĂ© juridique ni de flux financiers entre les collectivitĂ©s. Il n'y a pas non plus de moins-value sur lâopĂ©ration dâAubervilliers, car GPA a pour bonne habitude de mettre en concurrence les opĂ©rateurs sur plein de choses, mais pas sur le prix. Quelques mois aprĂšs la signature de lâalliance, le promoteur est retenu et les permis dĂ©posĂ©s. Câest donc une solution simple, fondĂ©e sur une entente politique solide forgĂ©e pour lâoccasion, et qui sâĂ©tend aujourdâhui Ă dâautres sujets de solidaritĂ© territoriale. Alors Ă©videmment, entre la puissance dâun GPA, le dynamisme des maires de Saint-Dizier et dâAubervilliers, on peut considĂ©rer que câest une conjonction exceptionnelle. Mais la simplicitĂ© de lâopĂ©ration permet sa rĂ©plicabilitĂ© dans dâautres territoires, avec des mĂ©tropoles rĂ©gionales qui pourraient ainsi engager une coopĂ©ration territoriale concrĂšte avec des communes proches.
Vous Ă©couterez lâĂ©change que jâai eu avec Stephan de Fay, le Directeur GĂ©nĂ©ral de GPA, sur cette initiative pleine dâenseignements. Jâen retiens notamment la nĂ©cessitĂ© dâune maĂźtrise fonciĂšre publique en amont, d'une rĂ©elle entente politique permettant de choisir en commun un mĂȘme opĂ©rateur, mais surtout de la nĂ©cessitĂ© dâun mĂ©diateur au cĆur du dispositif, capable de faire du lien et de donner du sens.
â Sylvain Grisot (LinkedIn)
PS : Nous avons dĂ©cidĂ© de mener une enquĂȘte nationale autour du dispositif ZAN. Afin de nous aider dans cette rĂ©flexion, merci de rĂ©pondre Ă cette rapide enquĂȘte (ça ne prendra pas plus d'une minute) et de la diffuser largement : EnquĂȘte Nationale sur le dispositif ZAN
đ Le 30 janvier, Comment faire avec ce qui est dĂ©jĂ lĂ ? La piste du bricolage. La Fab Ă Bordeaux vous donne rendez-vous Ă 18h30 Ă la base du rĂ©emploi pour rencontrer la philosophe Fanny Lederlin autrice de Ăloge du bricolage (Puf, 2023). Cette rencontre sera suivie dâune table ronde.
đ° Nouvelles gĂ©ographies du faire et travail vivant dans lâAnthropocĂšne. « Ce sont ces opĂ©rations de fabrique ou de faire, inhĂ©rentes Ă toute activitĂ© Ă©conomique mais qui sâexpriment de maniĂšre privilĂ©giĂ©e face au constat dâun environnement bouleversĂ©, que ce numĂ©ro propose dâinterroger, en analysant dâun mĂȘme regard leurs matĂ©rialitĂ©s et expressions spatiales et les logiques sociopolitiques quâelles sous-tendent ». Avec notamment un article sur lâanthropocĂšne comme « grand rĂ©cit, câest-Ă -dire quâil constitue Ă la fois un programme qui donne de la cohĂ©rence Ă des recherches qui se dĂ©veloppent aujourdâhui, tout en servant de fondement idĂ©ologique et politique Ă lâaction et Ă lâengagement. Dans cette perspective, lâanthropocĂšne fait autant quâil fait faire. » (EchoGĂ©o, via la Veille Environnement Ville et SociĂ©tĂ©).
đ Ressources, un dĂ©fi pour lâhumanitĂ© (Casterman 2024). Voici un long dialogue dans la vraie vie entre Vincent Perriot et Philippe Bihouix qui a pris forme concrĂšte dans cette trĂšs belle bande dessinĂ©e. Un dialogue et un voyage dans lâespace, les futurs et les ressources qui permettent de prendre conscience de leur finitude, mais aussi de lâimportance du volume de matiĂšre nĂ©cessaire Ă chacun de nos gestes quotidiens, comme de la fuite en avant que constitue le technosolutionnisme - bien au delĂ des seuls enjeux de la fabrique urbaine. De belles images, des concepts qui s'Ă©clairent, des impasses qui apparaissent et des pistes qui se concluent dans un doute engagĂ© :
- Est-ce que lâhumanitĂ© peut prendre une autre trajectoire ? Peut-on faire âatterrirâ en douceur ce vaisseau fou quâest devenue notre civilisation technologique ?
- Je ne sais pas⊠Mais Thomas More concluait son utopie ainsi : âOptarim verius, quam sperarim / Je le souhaite plus que je ne lâespĂšreâ