🍇 Première ligne
Retour du front. Je rentre de la première ligne qui fait déjà face au dérèglement climatique et je me dois de partager ça avec vous. Je n’étais pas au milieu du Pacifique à assister à la submersion d’une île, je ne suis pas non plus allé parcourir les cendres de Lytton. Non, la ligne de front passe à une vingtaine de minutes de chez moi, dans une parcelle de vigne du Domaine de la Fessardiere (ne pas manquer le « Coup de foudre ») que je suis allé vendanger, comme chaque année. Des vendanges fin septembre, alors que celles de l’année dernière étaient fin août. La floraison précoce d’un printemps trop doux a fait les frais des dernières gelées, et un pied sur deux ne porte même pas de raisin. Un accident ?
Non, c’est le fameux nouveau normal. Jérôme le dit très bien, depuis qu’ils ont repris le domaine en 2014, seule l’année 2018 a été exceptionnelle : il ne s’est rien passé. Car le réchauffement climatique n’est pas qu’une hausse plus ou moins importante des moyennes (nous sommes sur la trajectoire de 2,7°C à la fin du siècle), c’est aussi une intensification des évènements extrêmes : vagues de chaleurs, pluies torrentielles, sécheresses, incendies… Ce qui était hier exceptionnel va devenir la norme, la canicule de 2003 va rapidement être un été normal à Paris. Mais ce sont aussi des évènements d’une autre ampleur qui sont attendus, dans des régions qui n’étaient pas auparavant touchées. Les faits sont là, ne perdons pas de temps avec les réfractaires, mais passons du temps avec celles et ceux qui doutent sur la façon d’agir. Car nos villes aussi sont en première ligne. Au bord des cours d’eau comme en secteur littoral, elles sont plus exposées aux inondations, au recul du trait de côte et aux submersions marines. Mais l’urbanisation privilégiée de ces secteurs a aussi augmenté le nombre de personnes exposées aux risques, tout comme l’imperméabilisation des sols a accéléré le ruissellement de l’eau de pluie. Nos villes sont aussi plus sensibles aux vagues de chaleur dont l’effet est décuplé par la minéralisation des sols. Elles sont donc des victimes de choix des dérèglements climatiques en cours, mais aussi de nos choix d’aménagement.
Il est temps d’adapter nos villes et nos territoires à ces nouveaux chocs, mais il faudra pour cela forger une nouvelle culture du risque. On a longtemps écouté le passé pour anticiper les problèmes qui pourraient survenir et imaginer des solutions techniques. Mais nous n’avons plus de références. Impossible désormais de nous reposer sur l’histoire, la modélisation, la technique et la procédure pour nous préparer au pire. Il nous faut nous préparer à tout. Changer de philosophie en passant de la ville résiliente capable d’encaisser des chocs rares, mais prévisibles, à la ville adaptative capable de se transformer en continu en fonction de l’évolution inattendue de son environnement et des besoins. Faire la ville comme on cultive le raisin, en écoutant la nature avec humilité.
— Sylvain
PS : Ecoutez notre nouvel épisode de podcast tiré du webinaire avec Stein van Oosten sur comment changer la ville par le vélo. Bonne écoute !
Analyse · Expérimenter la ville
Quel peut être l'apport du design urbain pour faire la ville du bien-être et de la bonne santé ? Pour donner envie d’espace public ? Courte analyse sur le design urbain comme outil pour expérimenter nos villes, avec une escale dans la région Rhône-Alpes.
Ouverture · Lire, écouter, rencontrer, voir...
📅 Agenda.
- Du 6 au 10 octobre : Biennale d’architecture et d’urbanisme de Caen Normandie. (Insitu Caen)
- Le 12 octobre : webinaire “La redirection écologique dans les territoires : comment passer à l’acte”. (Horizons Publics)
- 12 octobre : séminaire en distanciel “Vers une compréhension plus intégrée des enjeux territoriaux sur le continuum villes-campagnes”. (INRAE)
- 12 octobre : webinaire sur l’outil Cartofriches pour réduire l'artificialisation des sols. (Idealco)
- Du 13 au 19 octobre en Ile de France : festival “Ville, Architecture et Paysage au cinéma”. (Close Up)
- Du 15 au 17 octobre : journées nationales de l’architecture sur “Vivre ensemble”. (Journée Architecture)
🎙️ Podcast. Série sur les expériences de sobriété en Loire-Atlantique : habitat sobre, oasis sociale et réparation d'objets sont au rendez vous. On aime bien le nom aussi. (ElemenTerre)
📉 Déclin urbain. Baisse de population, désinvestissement dans le centre-bourg et les aménités, fermeture des boutiques, abandon de lieux... Que se passe-t-il quand une ville ne veut plus être une ville ? Exemple d'une ville étatsunienne Wilkinsburg, qui va peut-être se fondre dans la ville de Pittsburgh pour être "sauvée". In English. (Bloomberg)
🤩 Impact. La plateforme Commune Mesure est opérationnelle ! L’occasion pour les gestionnaires de tiers-lieux de comprendre quels impacts sont générés grâce à eux sur leur territoire. Pour en savoir plus, vous pouvez écouter notre podcast avec Martin Locret sur ce sujet. (Commune Mesure)
🚂 Tchou tchou. Pour les fans de train, et on sait qu'il y en a parmi vous : comment les petites lignes ferroviaires ont dessiné la France ? Avec Nacima Baron, François Philizot, Cédric Abonnenc et Juliette Labaronne. (France Culture)
📖 A lire. Héritage et fermeture, une écologie de démantèlement, d'Emmanuel Bonnet, Diego Landivar et Alexandre Monnin (éditions divergences)
Il y a des livres coup de poings qui vous font penser que vous n'avez vraiment rien compris aux enjeux de notre temps. Si vous n'êtes pas prêt passez votre chemin pour l'instant, mais si vous l'êtes concentrez vous, ce n'est pas un livre de table de chevet. Les auteurs rebattent les cartes de l'Anthropocène et proposent de nouvelles pistes de pensées pour une nouvelle écologie politique. Ils nous amènent à construire une vraie stratégie pour répondre à ce dont nous héritons, notamment les communs dit "négatifs". Le chantier est immense et international :
Nous dépendons pour notre subsistance d'un "monde organisé", tramé par l'industrie et le management. Ce monde menace aujourd'hui de s'effondrer. (...) nous héritons contre notre gré de communs moins bucoliques, "négatifs", à l'image des fleuves et des sols contaminés. (...) Contre le front de modernisation et son anthropologie du projet, de l'ouverture et de l'innovation, il reste à inventer un art de la fermeture et du démantèlement : une (anti)écologie qui met les mains dans le cambouis.
🎍 Urbanisme écologique. De par l'uniformisation des plantes et des espèces implantées, les paysages urbains s'homogénéisent, et on assisterait à une disparition progressive de la relation entre le citadin et les milieux et paysages naturels. Voici un dossier complet sur le sujet mêlant savoirs scientifiques, connaissances historiques, techniques opérationnelles et pensées politiques. Pour appeler les faiseurs de ville à pratiquer un "urbanisme écologique". (Métropolitique)
📢 Tribune. Et si on répartissait les droits entre les intérêts des humains et ceux des non-humains ? Et si un fleuve pouvait être représenté par un avocat au tribunal ? Plongez dans l'art et l'imaginaire des récits pour sortir d'une vision utilitariste de la nature, avec le Parlement de Loire. (Le Monde)
🗺️ Carto. Inutile et donc essentiel : un outil vous permettant de faire de magnifiques posters sur la base des données cartographiques d’open street map. A explorer. (Hanshack)
dixit.net est une agence de conseil et de recherche urbaine. Tous les mercredis, nous décryptons dans notre newsletter les grands enjeux de la ville et de ses transitions. Si vous la lisez pour la première fois, c'est le moment :