đ RĂ©siliences territoriales
Et sâil Ă©tait temps de lire nos territoires par leur rĂ©silienceâ? Câest Ă cela que nous invite le Shift Project dans une sĂ©rie de publications Ă destination des collectivitĂ©s locales et des Ă©lus, intĂ©ressantes Ă plus dâun titre.
Pas question ici dâencaisser les coups du climat, ou de rĂ©viser les plans de gestion des risques, mais bien dâengager une transition globale permettant de prĂ©server qualitĂ© de vie et sĂ©curitĂ© en des temps perturbĂ©s. Le cumul des crises environnementales, des emballements systĂ©miques, et les enjeux sociaux et dĂ©mocratiques associĂ©s imposent dâagir vite pour prĂ©server nos libertĂ©s de choix plus tard, avec une approche locale nĂ©cessairement adaptĂ©e aux vulnĂ©rabilitĂ©s propres dâun territoire, mais guidĂ©e par quelques principes clefs inspirants, que jâinterprĂšte ici librement :
- Cesser dâaggraver les problĂšmes en relisant projets et stratĂ©gies Ă lâaune des ruptures qui sâamorcent. Les nĂ©cessaires abandons concernent notamment des projets urbains ou dâinfrastructures, souvent engagĂ©s il y a longtemps sans conscience de lâampleur des enjeux Ă©cologiques, et dont la durĂ©e de vie nous engage pour longtemps. Mais la question est moins technique que politique, tant ces changements de cap sont sensibles.
- Assumer lâinertie du systĂšme urbain et territorial en agissant dâabord sur ce qui prendra du temps. Planification urbaine, systĂšmes de mobilitĂ©, structuration des filiĂšres de production de la ville, transition agricole, changement des comportements⊠Tout cela est long Ă faire bifurquer, il faut donc commencer vite.
- Miser sur les cobĂ©nĂ©fices en commençant par les actions, dont les effets sont multiples. La rĂ©duction de la consommation dâhydrocarbure permet de rĂ©duire les Ă©missions de GES et dâĂȘtre moins dĂ©pendant dâapprovisionnements risquĂ©s, la sobriĂ©tĂ© fonciĂšre induit aussi une rĂ©duction des mobilitĂ©s carbonĂ©es. La vĂ©gĂ©talisation massive de nos villes permet de mieux encaisser les coups de chaud et les Ă©vĂ©nements pluvieux, et rend aussi la ville plus aimableâŠ
- Apprendre Ă voisiner en tissant des rĂ©seaux de collaboration territoriale au-delĂ des frontiĂšres administratives. La compĂ©tition territoriale Ă©tait bonne pour les 30 insouciantes. Les dĂ©cennies qui viennent ne sont pas celles de lâautonomie, mais bien des solidaritĂ©s territoriales.
- Et se prĂ©parer Ă profiter des crises pour accĂ©lĂ©rer les transitions. Dans lâurgence de la crise, la solution de la reconstruction Ă lâidentique sâimpose souvent faute de temps pour penser les alternatives. Or, la sortie de crise ne doit plus ĂȘtre un temps de retour Ă la normale, mais bien une accĂ©lĂ©ration des processus de transition. Câest lĂ que la rĂ©silience est un processus dâapprentissage et pas juste un mĂ©canisme de rĂ©action aux crises.
Car ce nâest pas une crise, mais bien une nouvelle Ăšre qui sâouvre, avec un nouveau rĂŽle qui se dessine pour les Ă©lus locaux pour les 30 turbulentes. La figure du leader qui montre le cap et dĂ©cide pour tous doit sâeffacer devant celle du pĂ©dagogue, du rassembleur et de lâanimateur du collectif. Une tĂąche complexe pour des temps qui ne le sont pas moins, et la nĂ©cessitĂ© lĂ aussi dâengager une vraie redirection.
â Sylvain Grisot (Twitter / Linkedin)
PS : Vous avez encore jusqu'au 23 février pour répondre à l'appel à contribution de Construction 21 sur l'intensification des usages ! Nous animons ce dossier collectif avec Eléonore Slama, qui a écrit une belle tribune dans Le Monde sur le sujet.
Ăchange avec Laurent Delcayrou, coauteur pour le Shift Project dâun cahier intitulĂ© âClimat, crises : Comment transformer nos territoiresâ. Il est question de rĂ©silience territoriale, pas simplement pour encaisser les coups du climat, mais pour engager une transition globale permettant de prĂ©server qualitĂ© de vie et sĂ©curitĂ© en des temps perturbĂ©s. Nous avons dĂ©taillĂ© ensemble quelques clefs qui doivent permettre aux territoires de passer Ă lâaction, avec un nouveau rĂŽle qui se dessine pour les Ă©lus locaux dans les trente turbulentes.
· Podcast. Un retour trĂšs clair sur les enjeux de la transition Ă©nergĂ©tique Ă partir des scĂ©narios de RTE. On y mesure la hauteur de la marche sur les enjeux sociaux et les questions de sobriĂ©tĂ©. C'est loin de lâopposition purement formelle nuclĂ©aire contre renouvelables. Dans tous les cas, le besoin de fixer le cap permettant des investissements massifs est lĂ , et il faut commencer dĂšs maintenant. (Chaleur humaine)
· RĂ©emploi des matĂ©riaux. Dossier complet sur le rĂ©emploi des matĂ©riaux de construction, de lâexpĂ©rimentation Ă la massification. De nombreuses thĂ©matiques sont abordĂ©es pour faire le tour du sujet : la digitalisation, la construction circulaire, le rĂ©emploi dans la pratique des architectes, ainsi que des exemples concrets dâexpĂ©rimentation. Dâailleurs, si ce genre de format vous intĂ©resse, vous pouvez participer au prochain dossier sur lâintensification des usages dans nos villes, jusquâau 17 fĂ©vrier. (Construction 21)
· (Re)dĂ©couvrir lâeau. Un canal dans la ville dâUtrecht, aux Pays-Bas, recouvert dâasphalte dans les annĂ©es 60-70 afin de crĂ©er une autoroute urbaine. Et comme finalement, câĂ©tait pas terrible, la collectivitĂ© est revenue en arriĂšre afin de laisser rejaillir lâeau. Article dĂ©couvert dans la newsletter Daily Green. In English. (Bycle Dutch)
· Les trajectoires socio-Ă©conomiques partagĂ©es. Ou, en anglais, les âShared Socio-econimic Pathwaysâ. Vous avez sĂ»rement dĂ©jĂ vu certains des graphiques dĂ©veloppĂ©s par les SSPs, mais vous ne savez pas vraiment ce que câest : cet article revient sur leur histoire et les cinq scĂ©narios proposĂ©s de façon fluide et claire ! Un article qui date de 2018, mais qui reste trĂšs actuel pour comprendre la modĂ©lisation des scĂ©narios qui peuvent ĂȘtre utilisĂ©s par le GIEC. In English. (Carbone Brief)
· Une Ă©cologie dĂ©coloniale. Penser lâĂ©cologie depuis le monde caribĂ©en, Malcom Ferdinand (AnthropocĂšne Seuil, 2019). Il y a des textes, oĂč seulement aprĂšs quelques pages de lecture, on sait quâils vont nous mettre une claque, car ils nous rĂ©vĂšlent une autre face du systĂšme quâon avait Ă peine vu scintiller. Malcom Ferdinand, par ses recherches, mais aussi son propre vĂ©cu, pointe du doigt les responsabilitĂ©s cuisantes de lâesclavage et de la colonisation sur lâexploitation des corps et de la Terre. LâĂ©cologie et la protection de lâenvironnement ne peuvent ĂȘtre pris comme un grand tout universel, alors quâils sont faits de tant de pluralitĂ© et de conflictualitĂ©. Lâauteur appelle davantage Ă des rencontres entre celles et ceux qui sont dĂ©jĂ lĂ , animaux humains et non-humains, et celles et ceux qui âretournent Ă la Terreâ.
La crise Ă©cologique et lâAnthropocĂšne seraient-ils les nouvelles expressions du âfardeau de lâhomme Blancâ Ă sauver âlâHumanitĂ©â dâelle-mĂȘme ? (âŠ) La Terre nâest pas notre maison. Câest ramener la Terre au seul cadre dâun enjeu de propriĂ©tĂ©, Ă lâimage de la course impĂ©riale Ă lâaccaparement de territoires et de ressources. La Terre est la matrice du monde. Dans cette perspective, lâĂ©cologie est une confrontation Ă la pluralitĂ©, aux autres que moi, visant lâinstauration dâun monde commun. Câest Ă partir de lâinstauration cosmopolitique dâun monde ente les humains, avec les non-humains, que la Terre peut devenir non pas seulement ce que lâon partage, mais ce que lâon a âen commun, sans le possĂ©der en propre".
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